Les causeries akklésiastiques sont des discussions à bâtons rompus et de ce fait largement improvisées entre Ivsan Otets – l’auteur des Cahiers Jérémie – et une lectrice de ces mêmes Cahiers. Leurs échanges tournent autour d’un thème lié à la philosophie religieuse, autour d’un auteur, ou plus directement et tout simplement d’un passage biblique. Aussi ces entretiens se veulent-ils akklésiastiques : telle est en effet la lecture que les Cahiers Jérémie font de l’Évangile : le Christ, c’est l’akklésia et « le royaume des cieux seul »… – tout ce qu’on y rajoute vient de l’homme raisonné et raisonnable.
« Akklésiastique » ?!
Le terme donne à penser le christianisme comme étant fondamentalement – sans église ! C’est pourquoi il n’est pas question ici d’imaginer une théologie ou un quelconque dogme de l’akklésia. En effet, tenter de formuler un « système akklésiastique » conduirait tout simplement à bâtir un système à la place d’un autre ; à faire en quelque sorte de l’irréligion une religion. Qu’est-ce donc penser l’Évangile en termes akklésiastiques ? C’est abolir toute vérité générale – qu’elle soit l’Église, la Science, la Politique… et que sais-je encore. Le Christ n’a-t-il pas continuellement agi ainsi ? La vérité existentielle était pour lui irréductible ! Il n’avait même aucune tolérance dans le rapport qu’entretient l’homme avec toutes les vérités éternelles, tant les vérités naturelles auxquelles toutes les espèces sont soumises que celles sculptées au génie de la pensée humaine. L’homme est la mesure de toute chose disait, lui aussi, le Nazaréen. Aussi n’accepta-t-il jamais l’enfer – à savoir qu’un homme soit « fait pour une loi » (cf. marc 227), qu’il soit fait pour une vérité immuable . C’est aux lois à être façonnées pour les hommes, c’est à l’immuabilité de s’incliner sous la volonté de notre liberté, et c’est à la Loi « divine », à la Thora même, d’être le valet de l’homme. Le Christ est venu annoncer un monde où le « je suis » est roi ; un monde où, en effet, cette Bonne nouvelle conduit inévitablement à l’abolition du Temple – l’église d’alors. L’Évangile est bien l’abolition de l’Église, le théologien Karl Barth n’a fait que traduire par cette formule le scandale du Christ et l’utopie du monde-à-venir.
Ainsi l’idée de « causerie » sied fort bien à la parole akklésiastique de par, précisément, son aspect informel, impromptu et de partage. Comment en effet, tout en étant passionnée du Christ et de son existentialisme, une fraternité supportera-t-elle des propos préformatés qu’un prédicateur imposera à une foule muette ; propos au sein desquels la Vérité, dit-on, apparaîtra inévitablement… ? Qui donc a le pouvoir de contraindre ainsi la Vérité ? Personne. Et celui qui cherche réellement la Vérité doit bien l’admettre : il faut toujours chercher, toujours causer, toujours questionner. La causerie est donc bien un reflet de l’existence akklésiastique, raison pour laquelle tout l’évangile est composé sur ce mode : le Christ rencontre, s’adapte et adapte à chaque-un son propos ; il ne nous laisse aucune Vérité – si ce n’est Lui.
Pourquoi ?
Les causeries akklésiastiques sont complémentaires des productions écrites que l'on retrouve sur le site Akklésia. Ces échanges constituent en quelque sorte un libre retour sur les recherches et les publications d’Ivsan Otets.
Il se peut que dans cette perspective akklésiastique, derrière chaque thème ou chaque passage biblique abordé, les discours évangéliques habituels soient malmenés, voire même radicalement renversés. À quoi bon s’en effrayer ? Les enjeux du christianisme sont post-mortem, ils se concentrent essentiellement sur la résurrection et sur l’existence de l’Être au-delà de son histoire terrestre. Par conséquent il ne faut pas craindre de choquer traditions, théologies et morales, voire même de gifler quelques vérités éternelles que divinise le religieux. Laquelle de ces vérités dont se sera délectée ton âme viendra à ton secours quand la mort se présentera à ta porte ? Si le Christ ne t’accueille, toutes les églises du monde ne suffiront pas à relever ton âme d’entre les morts.